Here me call your name | Soren

•••  Un dernier cri, une dernière poussée et Cybelle Prince retomba sur les oreillers, épuisée. Un bref silence s'imposa dans la pièce, un bref instant de repos durant lequel la sorcière crut qu'elle finirait par s'endormir. « C'est un garçon madame. » annonça la sage-femme venue en urgence lorsque le couple s'était rendu compte qu'il leur serait impossible de rejoindre l'hôpital magique le plus proche. Du coin de l'oeil, elle vit son mari se redresser, lâchant sa main avec laquelle elle lui broyait les doigts depuis plusieurs heures pour s'approcher du bébé dans les bras de la sage femme. Sanguinolant, empaqueté à la va-vite dans un tissus et grimaçant, le nouveau-né fit une moue avant de se remettre à pleurer de plus belle. Premier né du couple, il avait été décidé qu'il porterait le prénom de Soren, en hommage au père, décédé, de Cybelle. Alors que le nouveau père s'approchait de son épouse, cette dernière se remis à crier, agrippant les draps du lit alors que la sage-femme reprenait sa place entre les jambes de la jeune maman. Le regard interloqué du mari tira un sourire à la professionnelle qui se contenta de préciser « Ce n'est pas fini. Le deuxième arrive. » durant presque toute la grossesse, le couple s'attendait à un enfant, espérant avoir un fils pour faire perdurer la lignée. Ce n'était que quelques semaines auparavant qu'on avait annoncé à Cybelle la présence d'un second enfant, bien plus petit, bien plus fragile. Des jumeaux. La naissance du premier avait été relativement facile, rapide mais la sage-femme s'inquiétait plus pour le deuxième bébé. Ce n'était pas la première fois qu'elle faisait face à ce genre de situation: un des jumeaux prenait le dessus sur l'autre et, dans la majorité des cas, le second ne venait jamais à terme, ou mourrait dans les premières semaines de vie. Si seulement Cybelle avait put se rendre à l'hôpital ... Un médicomage spécialisé n'aurait pas été de trop ! Concentrée, elle ordonna sèchement au père de s'éloigner du lit, de s'occuper de son fils voir de quitter la chambre. Si elle voulait que la mère et l'enfant reste en vie, il fallait que les éléments perturbateurs ne puissent déranger le travail qui s'effectuait encore. C'est ainsi que Cybelle fut emmené loin de cette mère qui ne l'avait encore tenu dans ses bras, emmené par son père de l'autre côté de la suite conjugale où il fut confier aux bons soins de l'apprentie, où il fut lavé et pour la première fois habillé. Après une éternité, deux nouveaux cris. Celui de Cybelle, au bord de l'épuisement. Celui du second enfant, prenant sa première gorgée d'air. Elle s'appellerait Alys, c'était ce qui avait été décidé au début de l'accouchement, alors que le mystère restait total sur son sexe. Une fois lavés et dorlotés, après avoir fait chacun un tour dans les bras de leurs parents, on les allongea dans le berceau à côté du lit. Il n'y en avait qu'un: la nouvelle de l'arrivée de jumeaux les ayant pris de court. Mais alors qu'ils plongeaient dans leur premier sommeil, la main de Soren attrapa celle de sa soeur. Comme un présage.


•••  La porte de la chambre claqua avec force, faisant légèrement vibrer le mur, l'enfermant dans l'écho sourd de la brutalité du geste. Une main passa dans ses mèches blondes, rabattant vers l'arrière quelques rebelles venues parasiter sa vue. Dans un tel état de rage, mieux valait le laisser seul, ne pas s'interposer, l'oublier quelques heures jusqu'à ce qu'il retrouve son calme. La grande maison, silencieuse, le savait et Soren en était convaincu, on ne viendrait pas le chercher pour le ramener de force à cette affreuse soirée. Du haut de ses huit ans, le garçon se montrait malin, intelligent et faisait la fierté de ses parents, néanmoins, il souffrait de sautes d'humeur qui le rendait inconstant et particulièrement effrayant lors d'une période de crise. « Soren ... » ce fut un murmure, à peine plus qu'un chuchotement. Soren sentit sa colère fondre instantanément, ses yeux cherchant à travers la pièce, le propriétaire de cette voix douce. Elle était là. Assise sur son lit, tressant ses longs cheveux blonds. « Alys ... » Elle était revenue ! Rien ne pouvait le mettre plus en joie. L'absence de la fillette finissait toujours par avoir des conséquences sur lui, hâtant les crises de colère jusqu'à ce qu'enfin, il puisse la revoir. « Tu as disparue depuis un moment. » dit-il avec une pointe d'amertume dans la voix provoquant un sourire tendre sur le visage de sa jumelle. Elle acheva sa tresse par un ruban rose pâle venant renforcer la pureté de sa vision. Alys, la douceur incarnée, telle une princesse de contes avec ses longues mèches blondes, sa robe blanche et son regard azur. « Mais je suis toujours avec toi, Soren. »


•••  « T'abuse Soren ! » se renfrogna la jeune femme alors qu'elle tapotait avec un linge humide pour retirer le sang de son front. Il ne pouvait s'empêcher de grimacer alors qu'elle appuyait sur son hématome avec force et il la soupçonnait de le faire exprès pour le punir. Hannah était adorable, une personne rare dans son entourage. « C'est pourtant pas ton truc la provoc ... » soupira-t-elle avant d'appuyer plus fort, lui arrachant un gémissement qui la fit sourire. « Tu n'as que ce que tu mérite. » finit-elle par ajouter avant de reposer son linge et de prendre une potion désinfectante. Il devait être beau encore ... Quelle idée d'en être venu aux mains avec un Serpentard. Voilà plusieurs semaines qu'ils étaient en désaccord et Soren n'était pas mécontent de ne pas appartenir à la maison au Serpent. S'il s'était reconnu dans les valeurs du groupe, expliquant l'entente qu'il avait avec ses camarades de promotion en début de scolarité, les divergences d'opinion ne cessaient d'augmenter avec le temps et ce qui était arrivé, quelques heures plus tôt, n'était que la suite logique de ce conflit. « T'inquiète ... » finit-il par soupirer « Le message est bien passée cette fois. » Son voix était empreinte de l'humiliation ressentie face à la grosse correction qu'il venait de recevoir. Son appartenance à Gryffondor, il ne l'avait pas vraiment mal vécu à son entrée à Poudlard, mais il ne comprenait pas pourquoi il n'avait pas fini à Serpentard: il se retrouvait dans la soif de pouvoir, l'envie irrépressible de contrôle, la compétition acharnée ou tous les coups étaient permis ! Il avait imaginé Alys, à ses côtés, et cette dernière ne le lâchait pas, éternel fantôme à ses côtés, vieillissant de la parfaite manière dont il l'imaginait, construction de son esprit traumatisé. Mais avec les années, il finissait par mépriser cette manière dont ses camarades vert et argent traitaient les autres, en particulier les nés-moldus. « Tu es bien trop impulsif pour être un Serpentard. » commenta alors Hannah comme si elle était capable de lire dans ses pensées. « Depuis le début tu es un Gryffondor dans l'âme: tu as le courage et l'imbécilité de cette maison dans le sang ! » ajouta-t-elle avant de reposer son attirail de soins. Hannah ferait une excellente médicomage ... Sur d'autre que lui bien sur ! Hochant la tête, le regard perdu dans le vide, Soren se surprit à y songer sérieusement.


•••  Hannah avait toujours eut raison. Dès le départ, elle avait observé, l'oeil anxieux, son cousin et son étrange entente avec une maison dont la réputation lui faisait froid dans le dos. Bien qu'elle comprenne ce qui attirait Soren auprès des Serpentard, elle ne pouvait s'empêcher de penser à la facette obscure de son cousin qui ne serait qu'exacerbée par l'ambition dévorante de sorciers avides de pouvoir et dont l'histoire avait maintes fois prouvé qu'il fallait se méfier. Le conflit avec eux ne pouvait être qu'un signe du destin, une seconde chance pour lui de nouer avec sa vraie maison. Oui, tout comme le Choixpeau, Hannah avait toujours eut raison. Dès le départ, elle savait que c'était auprès des Gryffondor qu'il trouverait son épanouissement et l'avenir n'avait fait que confirmer son affirmation. Après quelques mois à se remettre de la cuisante humiliation de s'être battu au sein de l'école, écopant d'un mois de retenu, il s'était pleinement investit dans la victoire des Gryffondor à la coupe, se retrouvant par la même bien mieux intégré qu'il ne l'avait jamais été . Sa vision de lui même changea du tout au tout et ses crises de colère s'étaient calmées. Seule Alys demeurait, éternellement présente pour commenter ses moindres faits et gestes. Il avait apprit beaucoup de choses auprès des autres, mais, plus que tout, il l'avait connu Elle.


•••  Il entendit Hannah pouffer de rire et son regard se posa sur sa cousine qui lui jeta un coup d'oeil moqueur. Rares étaient les fois où il s'était sentit rougir et pourtant, cette fois-ci, il sentit clairement ses joues chauffer avec intensité. Elle s'appelait Mary, c'était la fille du prof d'Arythmancie, une Poufsouffle qu'il n'avait jamais vraiment regardé tout au long de ces années. Bien qu'à son arrivée, il avait été comme frappée par quelque chose qu'il ne parvenait à nommer et qui s'échappait d'elle, comme une aura aimantée qui l'attirait incontestablement vers la sorcière, ils n'avaient pas échangés avant leur sixième année.. Il avait bien eu quelques mots avec elle au détour d'un couloir mais il ne parvenait pas encore à saisir ce qui le frappait tant chez l'anglaise. Pris en flagrant délit de contemplation, Soren se sentait mal-à-l'aise. Elle n'était pas la première jeune femme a attiré son attention: depuis quelques mois, Soren avait remarqué que certaines de ses camarades n'étaient pas insensibles à son charmes et n'hésitait pas à en user. Cependant, il ne voulait pas que les regards en coin qu'il lui lançait discrètement de temps à autre, passe pour une quelconque marque d'intérêt ! Elle l'intriguait. Voilà tout. L'attrait de la nouveauté, le besoin de découverte sans doute. Il préférait ne pas s'aventurer sur des terrains plus glissants que, du haut de ses dix-sept ans, il ne maitrisait pas du tout. Le cours finit par prendre fin et Soren attrapa ses affaires, reprenant sa pose lasse alors qu'Hannah était en grande conversation avec une amie commune. Du coin de l'oeil, il observa Mary quitter la pièce et ne suivit le mouvement que quelques minutes plus tard. « C'est sur que tu n'es pas le meilleur comité de bienvenue. » commenta Hannah après avoir tenté de comprendre pourquoi son cousin semblait si intrigué par cette sorcière. Peut être était-ce de savoir qu'elle avait manqué tant de mois de cours ? Elle l'ignorait. Il avait eu beau tenté de lui expliquer le cheminement de sa propre pensée, elle ne croyait pas un mot et persistait à lui conseiller d'aller lui parler directement. « Après tout, à part lui avoir dit bonjour ... Qu'est-ce que tu lui as dis hein ? » Rien, il ne pouvait le nier. Quelques salutations polies lorsqu'ils se croisaient dans les couloirs. Il devait passé pour un taré ... Encore. « Pourtant tu serais le mieux placé pour l'aider à reprendre les cours du bon pied: même si on dirait pas à t'regarder comme ça, tes notes sont toujours impeccables. » Le rictus taquin de sa cousine lui fit froid dans le dos. Il se demandait encore ce qu'elle avait derrière la tête quand cette dernière le poussa d'un geste brusque. Surprit, il ne réagit que lorsqu'il se sentit tombé sur quelqu'un d'autre. Alors qu'il se retournait pour râler sur Hannah, cette dernière avait disparue et il aperçu sa silhouette tourner au croisement suivant du couloir. Son attention se reporta alors que la pauvre victime de sa chute. Mary. « Désolé ... » finit-il par dire tout en l'aider à récupérer ses affaires éparpillées sur le sol. Il se releva, lui tendant la main pour l'aider à en faire de même. « Ma cousine a un sens de l'humour ... Discutable. » ajouta-t-il pour justifier le fait qu'il lui soit, littéralement, tombé dessus. « Je suis Soren » Des présentations semblaient de mise, maintenant qu'il venait de lui articuler plus de trois mots à la suite.


•••  Un sursaut le réveilla. Alys. Voilà bien longtemps qu'il ne l'avait pas vu. A quoi ressemblerait-elle aujourd'hui, si elle décidait de réapparaitre devant lui ? Combien d'années s'étaient écoulées depuis ? Cinq ? Six ? Il ne parvenait à s'en souvenir. Alys était un souvenir, une ombre, un fantôme venu le hanter. Il avait mis du temps à le comprendre, du temps à saisir que le regard désapprobateur de son père, lorsqu'il lui disait lui parler régulièrement, n'était pas du à une quelconque forme d'intransigeance. Alys n'avait jamais été là. Pas pour eux. Juste pour lui. Alys, sa jumelle, sa moitié. Il se souvenait des histoires que racontait sa grand-mère lorsqu'elle se laissait emporter par une vague de nostalgie. Soren et Alys, le duo inséparable. Et puis elle était partie. Emportée par une fièvre. Ils avaient prit pour habitude de se glisser dans le lit de l'autre quand il était malade ou quand l'orage éclatait. Il se sentait tout puissant avec elle, tel un chevalier protégeant une princesse, combattant des dragons et autres monstres ... C'était lui qui avait avertit ses parents que quelque chose de bizarre arrivait. Il s'était réveillé en premier, mais elle n'avait pas ouvert les yeux. Après plusieurs minutes, il l'avait secoué mais elle n'avait pas bougé. Leur jeux d'enfants étaient encore en cours: il était le chevalier qui la protégeait, qui la rassurait quand elle criait à la vue d'une araignée. Mais il n'avait rien pu faire quand la maladie s'était abattue sur la maison, emportant son grand-père, d'abord, et la petite fille ensuite. Elle avait toujours été fragile et la peine qui affligea la famille n'en fut que plus grande alors que la seule et unique fille de la famille reposait, immobile, froide, sur le lit de sa chambre. On avait tenté de lui faire comprendre, de lui expliquer qu'Alys ne reviendrait pas, que son âme était partie faire un long voyage, oubliant son corps derrière elle. Qu'elle devenait immortelle et accompagnait leur grand-mère à travers le monde. Aujourd'hui, elle lui manquait encore, comme une part de lui qui avait disparu en même temps qu'elle. Alys, la lumière qui avait disparue quand une autre, plus forte, plus vive et vivante, cette fois, était entrée dans sa vie.



••• « Tu as été trop loin cette fois, Soren ! » Cybelle avait toujours eut une voix forte, portante, qui rebondissait contre les murs pour mieux attaquer les oreilles des personnes présente. Un soupira s'échappa des lèvres du fils indigne. Un autre de celles de sa grand-mère dont les cris de colère de Cybelle venait perturber la régularité des gestes de sa baguette qui imposait un rythme aux aiguilles à tricoter. « Les répercussions ne retomberont pas que sur toi ! As-tu pensé à moi hein ? As-tu pensé une seule seconde aux conséquences que cela aurait sur moi ?! » Ajouta-t-elle, toujours aussi folle de rage tout en arpentant le salon de long en large. Ce geste, censé la calmer, avait plutôt l'effet inverse, constata Soren. Du haut de ses cinquante-sept ans, Cybelle encore une belle femme qui ne paraissait pas son âge: adepte de toute sorte de potion, elle entretenait avec attention sa beauté et sa jeunesse, ses longues mèches brunes et bouclés relevées en un chignon élégant, sa robe qui semblait flotter a chacun de ses pas. « Ton père avait raison, nous aurions du t'offrir un poste au sein du Ministère ! Sans doute aurais-tu eu plus conscience des répercussions que ton comportement peut avoir sur nous ! » Levant les yeux au ciel, Soren savait son calvaire a peine commencé: Cybelle était partie dans des remontrances dont il se souviendrait. D'aussi loin que sa mémoire lui permettait de remonter, il avait toujours eut un caractère difficile. Dès la mort de sa jumelle, il avait été intenable mais ce n'était que lorsqu'il avait commencé à parler de Alys lui apparaissant à toute heure du jour et de la nuit que les ennuis avaient réellement commencés. « Nous n'aurions jamais du accepter que tu arrêtes de voir le psychomage ! Ce n'était qu'un caprice d'adolescent ... » L'éternelle phrase qu'elle lui servait à toutes les sauces: il n'avait pu rejoindre le Ministère ? C'était à cause de son refus de continuer de voir un psychomage. Il pactisait avec les sangs-de-bourve ? Encore l'arrêt des séances. Il avait refusé des fiançailles avec une lointaine cousine ? Inutile de rappeler la raison ... « Tu étais censé les surveiller ! Pas t'en faire des amis ... Ce sont des impurs ! Des sous-êtres ! » Si elle savait ...C'était bien plus compliqué que cela. Plus qu'une rébellion tardive, Soren regrettait qu'elle ne comprenne pas ce qui motivait ses actes. Ce n'était pas première qu'ils avaient cette discussion, il détournait les tentatives de ses parents de lui faire intégrer le Ministère ou une quelconque forcé armée, obtenant un maximum d'information pour le parti modéré, et parfois même pour les anarchistes. Des actions qui avaient des conséquences lorsqu'il se faisait prendre ...

et voilà bel homme

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